L’un des plus vifs reproches adressés à l’actuel ISF tient au poids que cette imposition représente pour les actionnaires familiaux non dirigeants, privés de l’exonération des biens professionnels. Deux inconvénients graves ont longtemps résulté de cette situation. Ou bien la société augmentait les dividendes pour leur permettre d’honorer leur dette fiscale, et cet effort obérait sa capacité d’investissement. Ou bien les intéressés étaient contraints de céder leur participation, et c’est ainsi que l’on a vu des joyaux familiaux passer entre les mains de tiers avant que de se trouver totalement démantelés.
La création du pacte Dutreil a considérablement amélioré les choses à partir de 2004 en offrant aux actionnaires familiaux le droit de s’exonérer sur 50% puis 75% de la valeur de leurs titres, moyennant la souscription d’un engagement collectif de conservation réunissant 34% du capital (exigence ramenée à 20% s’agissant des titres
cotés).
Mais nous en étions restés jusqu’ici à des taux d’imposition annuels s’échelonnant de 0,55% à 1,8%. Il fallait encore des dividendes d’un montant significatif pour que, une fois payés l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux, l’actionnaire ait la ressource lui permettant d’acquitter l’ISF. Aux titulaires de hauts revenus, un dividende représentant 1% de la valeur des titres ne laisse plus qu’un revenu disponible de 0,654% après paiement de ces impositions. Si l’ISF annuel s’applique au taux moyen de 1,1%, le fait qu’il porte sur une base réduite au quart n’empêche pas qu’il faille encore lui consacrer 0,275%. Reste à l’actionnaire 0,379%.
Demain, l’ISF s’appliquera au taux maximal de 0,5%, soit un taux effectif de 0,125% lorsque sa base est ramenée au quart. Dans notre exemple, le dividende de 1% laissera, tous impôts payés, 0, 529% dans la poche de l’actionnaire. Ainsi s’approchera- t-on, sans l’aide extérieure du bouclier fiscal, de l’équilibre jugé raisonnable entre contribution fiscale et revenu disponible.
Source : Article paru dans « Les Echos » 5 mai 2011
Article rédigé par Jean-Yves Mercier, Avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre