Le projet fiscal du candidat Socialiste n’épargnerait ni les PME, ni les salariés, ni les commerçants, selon une étude du Cercle des fiscalistes, qui regroupe les meilleurs fiscalistes français.
Le Figaro s’est associé avec le Cercle des fiscalistes, un cercle de réflexion- « Thinktank » – qui regroupe les meilleurs spécialistes français de la fiscalité, de tous bords politiques, pour analyser les conséquences pratiques des principales propositions du PS. L’objectif consiste à expliquer ce qui pourrait changer pour les contribuables, à anticiper leurs conséquences économiques et à pousser, in fine, le candidat PS à clarifier les points de son programme s’agissant de certaines réformes trop peu précises pour être analysées.
« Le débat n’est pas de savoir s’il y aura plus d’impôt, mais de savoir qui les paiera» .En présentant son programme économique, il y a exactement une semaine, le candidat du parti socialiste François Hollande a joué carte sur table. Hier, au micro de RTL, il a persisté : « Quel que soit le président élu au mois de mai, il y aura une augmentation des prélèvements ». Dans son programme prévoyant un retour à l’équilibre des finances publiques à la fin du quinquennat, le PS annonce une hausse des taux de prélèvement obligatoire de 1,8 point sur cinq ans, pour les faire passer de 45,1 % du PIB aujourd’hui à 46,9 % en 2017. Une hausse sous deux formes : d’abord, 29,1 milliards de recettes nouvelles devront être trouvées dans les dix huit prochains mois pour faire baisser le déficit public à 3 % du PIB fin 2013, comme promis à nos partenaires européens.
Un ISF nettement alourdi
Le projet Hollande prévoit de revenir intégralement sur la réforme de l’imposition sur la fortune décidée l’an dernier par le gouvernement. À une nuance près. Le seuil d’entrée ne sera pas revu à la baisse : ne paieront l’ISF que les foyers ayant un patrimoine supérieur à 1,3 million d’euros. Mais ils s’en acquitteront sur la base des anciens taux et – surtout – ils seront taxés sur leur patrimoine au-dessus de 800 000 euros contre un plancher de 1,3 million jusqu’à présent. Par cette mesure, le PS évite de faire retomber sous le régime de l’ISF les personnes aux revenus modestes possédant un bien immobilier ayant pris de la valeur, par exemple. François Hollande chiffre à 2 milliards d’euros les recettes supplémentaires de cette réforme. Un chiffre très exagéré, selon le cercle des fiscalistes : « Il faut tenir compte des délocalisations fiscales que ce retour ne manquera pas de relancer », prévient Philippe Bruneau, président du Cercle des fiscalistes. En outre, l’entourage de François Hollande escompte 300 millions d’euros de recette de l’accélération de la suppression du bouclier fiscal. Cette somme constitue le reliquat encore dû par le fisc aux contribuables concernés. Si son annulation était décidée, « cela poserait un sérieux problème constitutionnel », prévient Philippe Bruneau, car « cela reviendrait à supprimer une créance que détiennent certains contribuables sur l’État français ». Chose impossible « sauf raison impérieuse d’intérêt général », indiquent les fiscalistes.
François Hollande veut alourdir l’impôt sur le revenu des Français les plus aisés. Aujourd’hui, le taux maximal de l’Ir est de 41% Il s’applique aux revenus par part qui dépassent 70 830 euros par an. Le projet PS prévoit de créer un taux à 45%, frappant les revenus par part supérieurs à 150000 euros. 60000 à 80000 ménages seraient pénalisés par cette mesure, d’après le Cercle des fiscalistes. En outre, 25 000 foyers très aisés (ceux dont les membres gagnent plus de 250000 euros par personne) s’acquittent depuis cette année d’une contribution sur les hauts revenus, créée par l’actuel gouvernement et fixée à 3% ou 4% de leurs revenus. Au total donc, ils pourraient voir leur taux d’imposition grimper à 48% ou 49%. Au Royaume-Uni, le taux maximal est de 50% en Allemagne de 45%.
Le PS veut que les avantages fiscaux soutiennent l’investissement « réel», pas les acquisitions financières. Actuellement, une entreprise qui s’endette déduit de son résultat imposable les intérêts de l’emprunt réduisant ainsi son IS. François Hollande veut que cette déductibilité des intérêts ne soit plus possible (ou limitée à 5%) lorsqu’une entreprise emprunte pour en racheter une autre. La déductibilité serait maintenue si le prêt sert à acquérir des machines. Pour le Cercle des fiscalistes, le financement des PME va pâtir de cette mesure. En particulier, les rachats d’entreprise par LBO. Rachats qui portent souvent sur des entreprises en difficulté, seront moins avantageux. Lors d’un LBO, un holding est créé. Celui-ci s’endette pour racheter la société cible. Les intérêts de la dette réduisent année après année le résultat imposable du groupe ainsi formé, ce qui permet de rembourser en partie l’acquisition. Le projet PS mettrait à mal cet équilibre. « Par ailleurs, les sociétés seront désavantagées dans la compétition pour le rachat d’entreprises par rapport à leurs concurrentes étrangères qui n’auront pas ces contraintes fiscales», souligne Jean-Yves Mercier, membre du Cercle des fiscalistes. En Allemagne et aux États-Unis, un tel système de déduction existe en effet. Pour le Cercle, « les sociétés françaises pourraient devenir la cible des investisseurs établis dans ces États», Le think-tank doute aussi des recettes de la mesure (4 milliards), puisque les entreprises pourraient s’adapter en rachetant leurs homologues par échange d’actions.
Taxer les revenus du travail au même niveau que les revenus du capital? Cette proposition taraude la droite comme la gauche depuis plusieurs mois, Dans son programme, François Hollande propose d’intégrer tous les revenus du capital aux revenus du travail et de soumettre l’ensemble au barème actuel de l’impôt sur le revenu. Le PS escompte près de 4,5 milliards d’euros de recettes de cette réforme. «Le pays le plus socialiste au monde l’Angleterre- taxe le travail comme le capital et même Barack Obama l’envisage», ironise-t-on dans le camp Hollande. Cet alignement serait en fait favorable aux petits épargnants. Aujourd’hui, les plus-values immobilières et mobilières (actions, obligations) ont un taux de taxation particulier, de19%. Les dividendes sont eux taxés à 21% (si le contribuable opte pour cette taxation forfaitaire), et les intérêts des obligations, à 24%. Le projet PS prévoit la disparition de ces taux d’imposition forfaitaires sur le patrimoine. Les ménages qui sont soumis à un taux d’impôt sur le revenu de 5,5% ou14% gagneraient: leur Epargne serait aussi imposée à 5,5% ou 14%. En revanche, les ménages imposés 30% ou 41% y perdraient. Pour eux, la taxation pourrait atteindre des niveaux records. Compte tenu des prélèvements sociaux additionnels, pour le moment fixés à13,5% et qui vont être relevés à 15,5%.suite aux annonces de Nicolas Sarkozy, « Le taux effectif d’imposition Supporté par les contribuables concernés sur tes intérêts qu’ils encaissent pourrait être de 45,5% ou de 56,5% selon leur tranche d’imposition», calcule Jean-Yves Mercier, membre du Cercle des fiscalistes.
« Le Cercle des fiscalistes regroupe notaires, banquiers, avocats, professeurs de droit et d’économie. Dans le cadre de la campagne 2012, ils décryptent, pour « le Figaro », les projets fiscaux des principaux candidats»
Source : Article paru dans « LE FIGARO ECONOMIE » du 02/02/2012
Une récente étude de l’Institut des politiques publiques nous apprend que les 0,1 % des Français les plus riches, les 378 foyers fiscaux versant les plus fortes contributions, seraient imposés sur leurs revenus au taux dérisoire de 2 %. Estimation surprenante, étant donné que le taux de l’impôt progressif culmine à 49 % dans la catégorie visée.
ans un rapport remis au gouvernement, un économiste préconise de financer la transition écologique par un impôt temporaire sur le modèle de l’ISF. Philippe Bruneau et Jean-Yves Mercier analysent les conséquences d’une telle mesure.
Les fiscalistes Philippe Bruneau et Jean-Yves Mercier examinent, dans une tribune au « Monde », une série de propositions en matière fiscale faites par les candidats à l’élection présidentielle et constatent que leur faisabilité juridique se heurte aux règles constitutionnelles françaises.
Olivier DAUCHEZ et Frederic VALENTIN, membres du Cercle, ont présenté l'enjeu fiscal de l'Exit-Tax dans le cadre d'une mobilité géographique en Italie.
Merci à tous les participants !