Une retour à la réalité s’impose

Publié le 6/06/2012

Une fois l’élection présidentielle passée vient le temps de la mise en oeuvre des promesses de campagne. A titre liminaire, on peut d’ailleurs regretter qu’elle n’ait pas donné lieu à un vrai débat fiscal. Une maïeutique collective qui, face aux défis qui nous attendent, aurait dessiné les contours de la société à laquelle nous aspirons, les objectifs à atteindre et surtout les moyens fiscaux pour y parvenir.
En lieu et place d’un tel débat, nous avons assisté, de la part des candidats, à une litanie de propositions sans cohérence d’ensemble. En guise d’exemple, le programme de François Hollande repose en matière de fiscalité du patrimoine sur trois grandes propositions qui ont été essaimées au cours de la campagne : l’alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail ; le retour à l’ancien barème de l’ISF ; la création d’une tranche d’imposition à l’impôt sur le revenu à 75%.
Analysées indépendamment les unes des autres, ces propositions peuvent donner lieu à débat, chacun les jugeant à l’aune de sa sensibilité politique et de leur efficacité économique. Mais si on les adopte toutes les trois ensemble ex abrupto, elles créent un dispositif fiscal confiscatoire. Un système fiscal où tous les revenus, travail et capital, seraient susceptibles d’être imposés jusqu’à 90,5% prélèvements sociaux compris avant d’être assujettis à un ISF dont le taux marginal atteindrait 1,8%. Pour parler court, un système fiscal où l’imposition totale dépasserait 100% des revenus imposables de certains contribuables. Donc un système spoliateur.

Avec son économie totalement ouverte sur le monde, alors que les assiettes taxables n’ont jamais été si mobiles et nomades, la France peut elle se permettre, au début du 21ème siècle, de se munir d’une législation fiscale confiscatoire ? Bien sur que non. En matière fiscale, le diable se cache souvent dans les détails. Mais cette fois-ci, il y a fort à parier que ce soit le Bon Dieu qui s’y dissimule. Plafonnement de l’ISF, lissage des revenus, exonération de certains revenus de la tranche à 75%…, les textes soumis au Parlement prévoiront nécessairement des échappatoires destinées à rendre supportables un dispositif qui ne le serait pas.

Source: Article paru dans Journal « Le Monde« du 06/06/2012

Pour aller plus loin :
Réforme fiscale

Fiscalité : « Les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent »

Les fiscalistes Philippe Bruneau et Jean-Yves Mercier examinent, dans une tribune au « Monde », une série de propositions en matière fiscale faites par les candidats à l’élection présidentielle et constatent que leur faisabilité juridique se heurte aux règles constitutionnelles françaises.

Réforme fiscale

Doper le pouvoir d’achat des Français par une baisse de la CSG

La baisse doit s’accompagner d’une augmentation du temps passé à travailler. De l’effort des actifs dépend la création de richesses supplémentaires qui fourniront aux intéressés des revenus complémentaires, accroîtront les recettes budgétaires liées à la vente de davantage de biens et services, et serviront à financer la baisse des prélèvements qui frappent les revenus de tout un chacun.

Réforme fiscale

Le casse-tête budgétaire créé par la crise sanitaire

Pour résoudre une équation complexe, le Cercle des fiscalistes propose d’utiliser l’épargne abondante des Français en émettant un nouveau grand emprunt national.


Notre Cercle perd l’un de ses membres fondateurs

Ce lundi 13 mars, Rémy Gentilhomme, est brutalement décédé d’une crise cardiaque à l’âge de 66 ans. Sa disparition nous affecte lourdement. Spécialiste reconnu de l’ingénierie patrimoniale, de la transmission d’entreprises familiales et du démembrement de propriété, domaines dans lesquels il a publié nombre d’ouvrages et d’articles de référence, Rémy Gentilhomme s’est, tout au long de sa carrière de notaire au sein de l’office Lexonot situé à Rennes, investi parallèlement dans l’enseignement en faculté de droit et dans les écoles de commerce, de même que dans les travaux du Conseil supérieur du Notariat. Il a apporté au Cercle la fraîcheur d’une réflexion personnelle et distanciée sur les dérives qu’il lui arrivait de relever dans le traitement fiscal des contribuables. En bref, il était un juriste et praticien de grande envergure, en même temps qu’un esprit libre toujours enclin à soutenir les thèses qu’il tenait pour justes sans crainte d’aller à rebours des idées reçues.

Ses collègues du Cercle, qu’il a contribué à fonder en 2006, rendent hommage à sa chaleur amicale et expriment à sa famille leur profonde sympathie face au deuil qui la frappe.