Les départs de riches s’accélèrent… comme en 1981

Publié le 9/02/2012

INTERVIEW
Bernard Monassier est considéré comme le notaire des riches. Dans son étude, il constate un afflux de candidats à l’expatriation. Et cette fuite des grosses fortunes a débuté avant même que la victoire de François Hollande soit perçue comme inévitable.


Vous êtes le notaire de la famille Dassault. Or, mercredi, lors d’un colloque de l’UMP, le sénateur Serge Dassault a declaré que les riches « qui sont restés vont partir à cause de l’élection de (François) Hollande ». Calcul politique ou vrai constat ?

Serge Dassault s’est peut-être exprimé de façon excessive. Mais il a raison sur le fond : le rythme des départs s’accélère. Dans mon étude notariale, chaque jour, deux à trois nouveaux clients nous sollicitent pour organiser leur expatriation définitive. C’est un rythme qui a très fortement augmenté depuis quelques mois et qui rappelle ce que j’ai connu en 1981, avec l’arrivée de François Mitterrand.

Selon Bercy, le rythme des départs, qui est d’environ 850 personnes par an, a très peu augmenté au cours des derniers mois. Qui croire, alors ?

Le chiffre indiqué par Bercy est vrai, mais il ne concerne que les contribuables déjà assujettis à l’impôt sur la fortune (ISF) qui choisissent de quitter la France. Il ne prend pas en compte la masse de ceux qui ne payaient pas l’ISF et qui quittent la France plutôt que d’y être assujettis. Personnellement, environ 40% des gens dont j’ai organisé – le plus légalement du monde – le départ ne payaient pas d’ISF.

Bercy ne comptabilise qu’une partie des départs. En redressant cette statistique officielle, j’estime pour ma part que les départs dépassent sans doute les 1.200 à 1.300 foyers fiscaux par an. Ce qui veut dire 3 à 4.000 personnes si on tient compte des conjoints et des enfants…

Le jeu en vaut-il la chandelle?

Cela dépend. Prenez un capital de 100 millions d’euros. Si on revient sur les anciens taux d’ISF, comme en a menacé Hollande, il paiera environ 1,7 million d’euros d’ISF. Pour ne pas entamer son capital il faudra que son capital rapporte plus de 3% brut. De plus, s’il va en Suisse, son impôt sera inférieur à 500.000 euros. Il n’y a pas photo, comme on dit. Et puis, ce genre de décision n’est pas toujours raisonné : l’ISF est le type même d’impôt que les plus fortunés ne supportent pas. Surtout qu’il a été aboli quasiment partout !

Et vous, le trouvez-vous injuste?

La question n’est pas là : je suis notaire et je n’ai pas à me prononcer. Mais je constate une chose, c’est qu’on nous parle souvent, dans la majorité actuelle, de l’exemple de l’Allemagne. Or, en matière d’imposition du capital, les Français sont trois fois plus taxés que les Allemands. Cette imposition représente 3,3% du PIB chez nous, mais seulement 0,9% chez madame Merkel. La différence est énorme. Et c’est sans doute encore pire car ces statistiques officielles, qui proviennent de l’OCDE, ont deux ans de retard. Or, depuis deux ans, c’est-à-dire sous la direction de Nicolas Sarkozy, la France a très fortement relevé ce type d’impôt…

Source: Article paru dans « Challenges » 09/02/2012

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