De la gestion entre époux

Publié le 12/05/2011

Epoux séparés de biens : de la vertu d’une bonne gestion !

le patrimoine de deux époux unis sous un contrat de séparation de biens est réparti en deux masses de biens : les actifs personnels de Monsieur et de Madame. Leurs gains, salaires et revenus des actifs ont vocation à accroître ces deux masses respectives.

Ce régime matrimonial est souvent choisi par les entrepreneurs pour protéger le patrimoine du conjoint du droit de poursuite des créanciers éventuels. Sous une apparente simplicité, il requiert toutefois une rigueur de gestion et de comptabilité et peut s’avérer défavorable à l’époux sans activité ou ressource personnelle. Un arrêt récent de la cour de Cassation1 vient de nous en rappeler, si besoin était, les écueils.

Le principe étant la séparation des patrimoines, tout mouvement de fonds entre époux excédant la contribution aux charges normales du mariage est donc susceptible d’être sanctionné. En l’espèce, les époux Olivaux avaient acquis en indivision différents immeubles que seul Monsieur avait contribué à financer. En outre, Madame avait placé et donné en son nom à ses enfants des actifs appartenant à son mari. Les juges n’ont pas accepté la défense des époux arguant d’un prêt de Monsieur à Madame remboursable au jour de la liquidation du régime matrimonial. Constatant l’absence de ressources de Madame, sans emploi, et l’absence de documents permettant à Monsieur d’agir en restitution d’une quelconque dette, ils ont au contraire retenu l’intention libérale de Monsieur à l’égard de Madame et qualifié ces différents mouvements de fonds de donation indirecte entre vifs. L’enjeu est particulièrement important du point de vue fiscal car rappelons que les successions entre époux sont exonérées de droits de succession alors que les donations demeurent taxables….

Afin de juguler les effets négatifs de la séparation de biens notamment en termes de déséquilibre des patrimoines, plusieurs axes de réflexion peuvent être étudiés au cas par cas :

1 – jouer a posteriori sur la notion de donation rémunératoire : en effet, dans divers jugements, les juges n’ont pas retenu l’intention libérale mais qualifié de rémunération la collaboration gracieuse au travail du conjoint ou encore la prise en charge excessive du travail domestique au regard d’une contribution normale ou enfin le sacrifice professionnel d’un époux permettant au conjoint de réaliser une carrière. La notion de donation rémunératoire est toutefois éminemment personnelle, soumise à l’appréciation des juges et donc fragile sur son principe et son montant. Elle a d’ailleurs été écartée dans l’affaire Olivaux.
2 – il peut donc être plus prudent et pérenne de procéder à une donation dûment enregistrée entre époux, exonérée jusqu’à 80.724 euros en 2011. Une donation permet en outre l’effacement très précieux des plus-values latentes sur des valeurs mobilières fortement valorisées depuis leur achat.
3 – Autre voie pour renforcer leur protection réciproque, les époux peuvent aménager leur régime matrimonial en décidant de basculer certains actifs financiers ou immobiliers dans une sphère commune dont les contours peuvent être assez librement dessinés. La mise en communauté permet de ne plus tenir compte de l’origine du financement desdits biens.
4 – Enfin, l’assurance-vie demeure également un outil de protection du conjoint survivant, en franchise de droits de succession, et de rééquilibrage à terme des patrimoines, en tout état de cause financiers.

Philippe BRUNEAU Directeur de la Clientèle Privée et Entreprises Banque Neuflize OBC Président du Cercle des fiscalistes (lecercledesfiscalistes.com)

Sophie BREUIL Directeur de l’Ingénierie Patrimoniale Banque Neuflize OBC

Source : Article paru dans « Valeurs Actuelles » 12/05/2011

 

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