France ou Californie, quelle fiscalité pour la succession de Johnny Hallyday ?

Publié le 16/04/2018

Faute d’harmonisation fiscale au plan mondial, citoyens et entreprises sont incités à faire des montages d’optimisation fiscale complexes et coûteux, analyse Maître Bernard Monassier. Les scandales fiscaux récents, Panama ou Paradise Papers, l’ont à nouveau montré. La succession de Johnny Hallyday devrait rouvrir le débat sur le niveau d’imposition en France.

Où était domicilié Johnny Hallyday ? Début décembre, « l’idole des jeunes » a été élevée au rang de « héros national » par le Président Macron lors d’un hommage populaire venu couronner une carrière exceptionnelle. Sa succession soulève désormais des points juridiques et fiscaux complexes, sans compter les droits d’auteur, et de composition, d’interprétation et d’édition musicale.

La star du rock était, paraît-il, domiciliée aux États-Unis. Je ne connais pas son dossier, ni ses éventuelles dispositions testamentaires. Mais la première question qui se pose est de savoir quelle fiscalité sera applicable à sa succession. Celle de l’État de Californie ou la fiscalité française ? Le lieu de résidence habituel du défunt au moment de son décès est, en effet, clé pour ses héritiers, à savoir son épouse et ses quatre enfants. La domiciliation de Johnny Hallyday au moment de son décès déterminera la législation applicable à sa succession.


L’hétérogénéité fiscale pousse à l’exil

Johnny Hallyday avait eu l’intention de se domicilier en Belgique ou en Suisse. Premier point, Johnny Hallyday n’aurait pas eu la tentation belge, luxembourgeoise, suisse ou américaine s’il n’existait pas une telle disparité fiscale entre les différents pays. Second point, les statistiques de l’exil fiscal seraient moindres, en particulier pour les artistes et les sportifs de haut niveau, si les taux n’étaient pas aussi élevés dans certains pays, France en tête.


Les héritiers trouvent anormal que l’État hérite de 45 % d’un actif

Entre parents et enfants, les taux de succession atteignent tout de suite 45 % en France. Quand les enfants héritent de 55 % du patrimoine de leur parent, les gens ne jouent plus. Les contribuables estiment qu’il est anormal que l’État hérite de 45 % d’un actif.
Quand les droits de succession s’élevaient à 20 % entre parents et enfants, avant 1981, les contribuables râlaient, parce qu’ils n’aiment pas payer des impôts, mais ils jouaient le jeu. À 45 %, les gens jettent l’éponge et ils cherchent des solutions d’optimisation. Il y a des États qui se prêtent à ce jeu en instaurant des taux inférieurs et des régimes de faveur au plan fiscal.


L’exception fiscale des non-domiciliés sur le sol britannique

Nulle part on ne parle du régime des non-domiciliés en Grande-Bretagne. Or ce régime insensé prévoit, lorsque vous êtes un résident français non-domicilié fiscalement en Grande-Bretagne, mais vivant à Londres néanmoins, aucun impôt à acquitter outre-Manche sur les revenus qui ne sont pas britanniques. Mais vous ne payez aucun impôt non plus en France car vous n’êtes pas non plus domicilié dans l’hexagone ! Est-ce normal ?

Le premier fautif en matière d’exil et d’optimisation fiscale à outrance, ce sont les États qui ont des fiscalités trop élevées. Pourquoi aussi peu de contribuables sont-ils poursuivis pour fraude en Suisse : parce que les taux sont supportables. En matière d’optimisation et de fraude fiscale, le mécréant et le responsable ne sont peut-être pas celui que l’on croit.

 

Bernard MONASSIER
Président BM FAMILY OFFICE
Vice-Président du Cercle des Fiscalistes

● Définition
L’optimisation c’est l’utilisation de la loi fiscale la moins imposée, selon le Conseil d’État. L’utilisation de la loi fiscale la moins imposée est légale et saine, toujours selon le Conseil d’État. D’ailleurs, un chef d’entreprise qui ne l’utiliserait pas commettrait une faute de gestion. Il doit gérer son entreprise au mieux, dans l’intérêt de ses clients, de ses salariés, de ses fournisseurs, et de ses actionnaires.
Simplement, il ne faut pas que l’optimisation repose sur une fiction, sur aucune réalité physique. Exemple, je me domicilie fiscalement dans un pays à fiscalité privilégiée parce que la fiscalité est plus faible mais en réalité je continue à habiter en France : c’est une fraude. J’ai le droit d’utiliser cette solution mais à condition d’être réellement domicilié.

Article publié sur le Blog de BM Family Office le 30 décembre 2017

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