Fallait-il plafonner les niches fiscales

Publié le 4/12/2008

A la lecture du projet de loi de finances pour 2009, il semble acquis que les avantages fiscaux octroyés par les niches fiscales seront plafonnés à partir de 2009, et que ce plafonnement se réalisera en deux étapes.

D’une part, le plafonnement spécifique de trois niches : l’activité de loueur en meublé professionnel, dont les conditions d’exigibilité seront plus contraignantes ; l’investissement en loi Malraux, dont la déduction du revenu imposable, très favorable aux hauts revenus, sera transformée en réduction d’impôt ; l’investissement DOM-TOM, dont l’avantage sera plafonné à 40 000 euros.

D’autre part, ces plafonnements spécifiques devront se conjuguer avec un plafonnement global selon lequel un contribuable ne pourra cumuler les réductions d’impôts grâce aux niches fiscales au-delà de 25 000 euros plus 10 % de son revenu imposable. Ce projet de réforme appelle de notre part les commentaires suivants.

Tout d’abord, à l’aune des sommes en jeu, son impact budgétaire reste mineur. Alors que les niches fiscales « coûtent » à l’Etat environ 60 milliards d’euros par an, l’enjeu du plafonnement se situe aux alentours de 200 millions d’euros.

Ensuite, l’attitude du gouvernement est ambivalente car l’on voit bien qu’il essaie de rendre conciliable ce qui ne l’est pas. D’un côté il veut orienter l’épargne des français les plus aisés vers des secteurs d’activité où elle n’irait pas sans carotte fiscale (DOM-TOM, monuments historiques, capital risque, cinéma…) pour éviter d’avoir à les financer lui-même. Mais d’un autre côté, il souhaite dissuader ces mêmes contribuables d’en faire trop. Or, les mesures proposées remettent radicalement en cause l’intérêt de recourir à ces investissements. Il faudra donc trouver un substitut aux capitaux que les contribuables n’investiront plus directement dans les monuments historiques ou les DOM-TOM. Et il y a fort à parier que les caisses de l’Etat seront mises à contribution. C’est pourquoi, quitte à ne pas supprimer les niches fiscales et à vouloir plafonner à tout prix, il eut été plus pertinent de plafonner le gain fiscal plutôt que l’investissement réalisé.

En définitive, il eut été préférable de recourir à un examen exhaustif des 400 niches fiscales et de se poser pour chacune d’elle la question de savoir si elles ont ou non une utilité pour la collectivité. Si oui, on les conserve ; si non, on les supprime. Pas de demi-mesure. Au lieu de cela, le Gouvernement a préféré une voie plus politique en plafonnant globalement toutes les niches sans distinguer le bon grain de l’ivraie, celles qui ont un intérêt social avéré de celles qui n’en ont pas. Le résultat est un texte indigeste, totalement incompréhensible par le contribuable lambda. Le Conseil constitutionnel appréciera, lui qui en décembre 2005 a déjà eu l’occasion de déclarer le principe du plafonnement des niches fiscales comme contraire à la Constitution en raison de son « excessive complexité, qu’aucun motif d’intérêt général ne suffisait à justifier ».

Article paru dans « Valeurs Actuelles« , décembre 2008

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