La loi Dutreil subit la critique d’organismes ou de commissions plus inspirés par la passion égalitaire décrite par Tocqueville que par l’analyse des faits.
Taxer encore davantage la transmission des entreprises familiales, comme le préconisent une kyrielle de rapports, serait une folie, argumentent Philippe Bruneau, Jean-François Desbuquois, Rémy Gentilhomme, Jérôme Turot, Jean-Yves Mercier, Bernard Monassier et Philippe Baillot, du Cercle des fiscalistes.
Publié dans Le Figarot, le 03/01/2022.
Le 21 décembre dernier, une note du Conseil d’analyse économique a proposé une vaste réforme des droits de succession en suggérant entre autres la suppression des avantages fiscaux du pacte Dutreil. Déjà, en novembre, invité à la 9 Journée de l’évaluation d’entreprise, l’ancien ministre Renaud Dutreil, père de la loi qui exonère des droits de succession et de donation, à hauteur de 75 %, la base d’imposition des transmissions d’entreprises familiales, affichait un pessimisme raisonné à propos de la pérennité de son texte.
La loi Dutreil subit en effet la critique d’organismes ou de commissions plus inspirés par la passion égalitaire décrite par Tocqueville que par l’analyse des faits. Ainsi, dans un document de travail de 2013 publié par la Direction générale du trésor, les auteurs insistaient sur le fait que «les fondements économiques des incitations fiscales en faveur de la transmission-continuité à la famille» lui apparaissaient…
Le consensus qui prévalait en France depuis deux décennies concernant l’utilité d’encourager, par un dispositif fiscal particulier, la transmission familiale des entreprises, subit des assauts récents et répétés, de la part d’économistes : Cahier du Trésor 2013/06, note d’analyse de France Stratégie- janvier 2017, rapport Blanchard Tirole, etc…
Les propositions du rapport Blanchard-Tirole font planer un danger sur « le tissu de nos trop rares grandes entreprises familiales françaises », mettent en garde les deux membres du Cercle des fiscalistes.
Périodiquement, depuis le milieu des années 1970, les médias se font l’écho de la cession d’entreprises françaises de taille intermédiaire (ETI) au profit de groupes multinationaux. Cela déclenche, à chaque fois, un flot de commentaires et de controverses sur cet étrange phénomène conduisant au délitement du tissu industriel français…